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La vie consacrée en Afrique : chances et défis

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Richard Kuuia Baawobr M.Afr., né le 21 juin 1959 à Nandom dans le district de Lawra au Ghana et mort le 27 novembre 2022 à Rome, est un ecclésiastique ghanéen, ancien supérieur général des Pères blancs, premier africain à occuper ce poste (2010-2016- et évêque de Wa de 2016 à sa mort. Il est créé cardinal par le pape François le 29 Mai 2022. Elu président du SCEAM le 30 Juillet 2022, il est décédé à Rome le 27 Novembre 2022.

Abstrait

Les perspectives positives du concile Vatican II sur la culture et la religion de l’Afrique ont aidé les théologiens et les philosophes à réfléchir sur la vie consacrée à partir de perspectives africaines. De concepts comme l’adaptation, l’incarnation et l’inculturation ont été explorés dans ces réflexions. Certains sont certainement plus pertinents pour la réflexion sur la vie consacrée en Afrique. Dans cet article, nous explorons avec l’aide du concept d’unification d’Eunice Karanja Kamaara, comment la culture africaine en soi a noyau valeurs qui, si elles sont vécues pleinement, offrent vraiment le meilleur de l’Évangile de Jésus. Ces valeurs comprennent le sens de l’omniprésence de Dieu, de la dignité de la personne humaine, de la relation en communauté et des soins pour les faibles de la société. Ces valeurs sont réunies dans l’esprit d’interdépendance de l’Untu et peuvent à juste titre être considérées comme des tremplins sur lesquels la vie consacrée en Afrique (et ailleurs) peut s’épanouir. Cependant, la vie consacrée est actuellement confrontée à plusieurs facteurs comme la discrimination dans nos communautés, l’individualisme et le consumérisme, en profitant de la crise dans les engagements permanents, se cachant derrière la culture pour justifier certains échecs dans le vécu des conseils évangéliques, et face au défi institutionnel de vivre le charisme et de répondre aux besoins pastoraux locaux et prendre soin des pauvres tout en préparant un avenir durable et viable pour ses membres. Il est important de surmonter ces défis en les utilisant comme un tremplin supplémentaire plutôt que de les envisager comme des pierres d’achoppement.

1. Maîtres coloniaux et personnes consacrées : quelle est la différence ?

Il y a un dicton populaire parmi les Dagara du nord-ouest du Ghana "Comment peut-on dire la différence entre un Blanc et un Père ». Il en est ainsi parce que comme les premiers prêtres et les religieux et les maîtres coloniaux étaient blancs, on ne pouvait pas, au premier abord, savoir la différence entre l'un et l'autre. Ce n'est qu'avec le temps que les gens ont appris à les connaître et distinguer un groupe de l'autre. Au début, le colonialisme et le christianisme ont souvent fait bon ménage en Afrique pour le meilleur et/ou pour le pire[2] avec pour conséquence qu'à l'époque de l'indépendance politique en Afrique, certains ont estimé que c'était aussi l'heure de l'indépendance religieuse.

La vie consacrée a ses racines en Afrique avec l'expérience de saint Antoine et des Pères et mères du désert au 4ème siècle, mais elle s'est déplacée de là vers l'Europe et l'Amérique avant de revenir sur le continent. Au début de l'évangélisation dans de nombreuses régions d'Afrique, la présence d'hommes et de femmes venus de l'Occident (Européens et Américains) qui n'étaient pas mariés et vivaient en communauté ont déconcerté beaucoup de gens. Ce fut le premier contact avec les personnes consacrées[3].

Je me souviens encore de l'histoire de la curiosité de beaucoup de gens qui ont assisté à la première ordination sacerdotale d'un prêtre Dagara dans le nord-ouest du Ghana. Les consacrés que notre peuple avait vu étaient tous blancs (Missionnaires d'Afrique, Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d'Afrique et Franciscaines Missionnaires de Marie). Pendant de nombreuses années, le séminariste, puis plus tard le cardinal Peter Porekuu Dery, vivait avec les M.Afr. et était formé par eux. Puisque les gens savaient qu'il voulait être prêtre, on tenait pour acquis qu'à la fin de sa formation et ordonné prêtre, sa peau changerait et il deviendrait blanc. Alors beaucoup de curieux s’étaient rendus à son ordination sacerdotale en attendant ce moment magique où il passerait d'être une personne noire à un homme blanc. Comme l'ordination était terminée et une telle transformation n’avait pas eu lieu, certains se demandaient s'il était vraiment un prêtre comme les autres. Avec le temps et au fur et à mesure que de plus en plus de jeunes hommes rejoignaient le séminaire et que de jeunes filles rejoignaient les couvents et avaient achevé leur formation et étaient ordonnés ou avaient fait leur profession sans tout changement radical de la couleur de leur peau, les gens avaient réalisé qu'il y avait plus dans la vie consacrée que le changement de la couleur de la peau.

Bien qu’elle ne soit pas perçue de la même manière dans toute l’Afrique, la vie consacrée -état de vie permanent dans l’Église-Famille-de-Dieu - a été initialement perçue comme étrangère dans de nombreuses régions d’Afrique. Elle concernait les personnes d’ailleurs, les étrangers qui ont appris et ils parlaient la langue des gens, les servaient, les aimaient mais n’en faisaient pas vraiment partie car ils ne connaissaient pas et ne valorisaient pas tout ce que les gens de la terre savaient et appréciaient. Par conséquent, être une personne consacrée, ou les Africains au début, était souvent l’équivalent de quitter sa culture pour adopter une nouvelle culture et un nouveau mode de vie. La nourriture, l’habitude et la langue faisaient partie de la nouvelle identité admirée par les gens du dehors et au même moment distinguaient les personnes consacrées et de celle du peuple.

Aujourd’hui, il y a des personnes consacrées partout en Afrique et la vie consacrée n’est plus tenue comme étrangère. Cependant, un dilemme reste dans une certaine mesure. Les choses s’empirent lorsque les personnes consacrées se perçoivent comme étant si différentes du peuple et qu’elles se coupent elles-mêmes hors de leurs propres pratiques culturelles ou les méprisent et pensent que celles de leur nouveau groupe sont supérieures.

Comme le dit le dicton : « Vous pouvez sortir une personne du village, mais vous ne pouvez pas lui enlever le village du cœur ».  Comment pouvons-nous, en tant que personnes consacrées en Afrique et de l’Afrique aujourd’hui, faire en sorte que notre identité d’Africains ne soit pas en contradiction avec notre engagement total envers le Christ, mais au contraire le fondement sur lequel elle est construite ? Comment pouvons-nous mieux posséder et apprécier le caractère sacré de la culture africaine ?  C’est ce que je propose d’explorer en examinant les ressources et les étapes pour la vie consacrée en Afrique et les défis que la vie consacrée pose à l’Afrique aujourd’hui.

2. D’une théologie de « l’adaptation » à une théologie de « l’unification » en Afrique

Les premières histoires de conversion au christianisme en Afrique montrent que dans le passé, certains chrétiens, en cherchant comment répondre à la foi des chrétiens, détruisaient souvent leurs effigies traditionnelles du passé. Parfois, cela a été fait volontairement, mais à d’autres moments, c’était à l’instigation des missionnaires qui leur avaient apporté l’Évangile du Christ. C’était comme si pour être vraiment chrétien, il fallait cesser d’être africain et s’adapter à un système de valeurs complètement étranger. Depuis Vatican II, une relation appropriée entre la culture et la religion est recherchée. Il y a une réflexion théologique en croissance rapide sur le continent africain et divers termes ont été utilisés pour qualifier cet effort. Il y a eu trois grandes tendances[4] : une théologie de l'« adaptation »[5], une théologie de l’« incarnation »[6] et une théologie de l’« inculturation »[7].

Ces efforts reposent sur la recherche d’affirmer les valeurs des Africains en tant qu’êtres humains créés à l’image et à la ressemblance de Dieu comme tout le monde. La vie consacrée a également traversé ces phases et est appelée à être chez elle en Afrique et dans la culture africaine. Lors d’un colloque à Nairobi, Eunice Karanja Kamaara, une professeure kenyane, a tracé l’évolution de la théologie en Afrique et en est arrivée à une quatrième catégorie : celle de « l’unification ». Cette catégorie met en lumière notre affirmation que la culture africaine offre des ressources / des tremplins pour la vie consacrée et que nous devons les prendre au sérieux comme un don que nous pouvons et que nous devons  apporter à l’Église universelle.

Depuis le défi lancé par le Pape Paul VI à l’Église africaine lorsqu’il a déclaré que l’Église en Afrique a le droit d’être africaine, plusieurs théologiens et philosophes en Afrique ont essayé de voir ce que cela impliquait. S’adressant aux évêques du Symposium de Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SECAM) le 31 juillet 1969 à Kampala, Ouganda, le Pape Paul VI avait dit: « Le langage et le mode de manifestation de cette foi unique peuvent être multiples... un certain pluralisme est non seulement légitime, mais souhaitable. ... vous pouvez, et vous devez avoir un christianisme africain. En effet, vous possédez des valeurs humaines et des formes caractéristiques de culture qui peuvent s’élever à la perfection, de manière à trouver dans le christianisme, et pour le christianisme, une véritable plénitude supérieure, se révélant capable d’une riche expression toute propre et véritablement africaine »[8].

Si, comme Kamaara, nous essayons de regarder les choses d’une manière non dualiste mais dans une perspective de « l’africain » et du « chrétien » en même temps la question identitaire peut être différemment perçue. Cela a des implications pour la vie consacrée en tant qu’état permanent dans l’Eglise. Être vraiment africain, c’est être un vrai chrétien. Par conséquent, la vie consacrée ne doit pas s’adapter, s’incarner ou inculturer les valeurs africaines. Ce n’est pas une question de valeurs chrétiennes à adopter en Afrique en tant que telles, mais les valeurs de la culture étant vécues ainsi radicalement qu’on se rend compte qu’elles sont réellement présence de l’Evangile de Jésus dans la culture africaine.  Kamaara, du point de vue théologique, affirme que « ce qui définit l’africanisme n’est pas tant la couleur de la peau, de la langue ou de la culture en général, mais c’est plutôt le caractère »[9]. Ce caractère est ce qui donne une identité à l’Africain et est le socle pour la foi chrétienne et, pourrions-nous ajouter, pour la vie consacrée. Kamaara l’exprime dans les termes suivants : « Dans la société africaine indigène, être vraiment africain, c’est être guidé par la philosophie untu, d’apprécier la dignité de la personne humaine, une éthique de vie communautaire et la centralité des relations. Si une personne agit contrairement à cela, elle n’est pas considérée comme africaine. Dans presque toutes les sociétés, une personne qui a gravement violé ce code éthique n’est plus considérée comme humaine et serait excommuniée »[10].

Untu, aussi appelée philosophie Ubuntu, est bien exprimée dans le proverbe zoulou qui dit « Umuntu Ngumuntu Nganbuntu » (« Une personne est une personne à cause d’autres personnes »). Toutefois, cette philosophie est aussi présente dans les écrits de nombreux philosophes et théologiens africains qui n’appartiennent pas au groupe bantu[11]. Comme le souligne Eugene Suom-Dery, parmi les Dagara du Ghana et Burkina Faso en Afrique de l’Ouest : « Il est impensable de concevoir la personne de Dagara sans penser à l’homme comme fondamentalement une relation dans un sens multidimensionnel »[12].

Cette solidarité humaine concerne toujours les générations passées, présentes et futures[13]. Dans le sillage du Concile Vatican II, le Pape Paul VI a identifié, en 1967, 4 caractéristiques de valeurs de la culture religieuse en Afrique : la vision spirituelle de la vie, le respect de la dignité de la personne humaine, le sens de la famille et l’importance accordée à la communauté. Nous rencontrons ces éléments pris sous différentes formes par Kamaara et d’autres théologiens en Afrique.

La théologie de l’unification de Kamaara a quelque chose à offrir dans la recherche de la pertinence du christianisme en Afrique et, par extension, pour la vie consacrée. Par l’unification elle signifie « unité de l’identité chrétienne et de l’identité africaine en un tout qui se manifeste par la valeur interne de l’amour rendue évidente extérieurement dans les actes de partage »[14].

Les deux valeurs majeures de l’identité africaine dont elle attire notre attention sont le respect de la dignité humaine et l’unité de toute la création qui s’exprime par l’importance donnée aux relations dans la communauté. Ce sont des valeurs fondamentales, non négociables de la société africaine et bien qu’elles soient exprimées ou vécues différemment selon les contextes, elles sont toujours présentes. Elles sont liées aux valeurs chrétiennes fondamentales de l’amour de Dieu et du prochain et de la justice pour tous, en particulier pour les nécessiteux. Lorsque la dignité de chaque être créé à l’image et à la ressemblance de Dieu est respectée, l’amour et une relation juste deviennent partie intégrante de la vie.

Il est vrai qu’il est difficile de trouver une société africaine pure à cause de différents facteurs qui sont intervenus dans la vie des gens depuis la période coloniale et postcoloniale et l’avènement des temps modernes avec l’impact de la technologie, l’Internet et la mondialisation. Certaines pratiques ont changé ou sont en train de changer à de nombreux endroits et font face aux contraintes de la vie moderne. Parfois, ces changements sont pour le mieux, d’autres fois ce n’est pas le cas. Il est donc vrai que « cinquante ans après Vatican II, et en avec le défi lancé par le Pape Paul VI, il est temps de faire le prochain pas pour mettre l’accent sur les valeurs indigènes et ethos ». Ainsi la proposition de Kamaara disant que :

« L’Eglise ne doit pas seulement s’approprier les manifestations extérieures de la culture africaine, mais beaucoup plus important, elle devrait purifier, renforcer, et élever les valeurs africaines internes pour affermir toute l’Eglise vers la plénitude dans l’unité »[15].

Cette vision ouvre notre conscience à la ressource et est en même temps au grand défi que l’Afrique lance à la vie consacrée en Afrique. Si, comme l’a dit Steve Biko, la contribution de l’Afrique au monde sera dans les relations humaines et donner un visage humain au monde, ses filles et ses fils consacrés ont une grande opportunité et un grand défi qui les attendent devant eux.

3. Quelques ressources pour la vie consacrée en Afrique

Il y a des éléments dans la vie des peuples d’Afrique qui sont vraiment déjà un terrain fertile sur lequel la vie consacrée, en tant qu’état permanent dans la famille de Dieu, peut prospérer.

3.1 L’omniprésence de Dieu

La croyance en Dieu est tellement prise pour acquise en Afrique[16] que, s’il y a un endroit où Dieu est spontanément invoqué dans les salutations, dans les bénédictions (et dans les malédictions aussi) c’est dans les sociétés africaines. Il n’y a pas une chose aussi simple et rapide qu’une salutation. Dans certains endroits, c’est un temps d’une bénédiction mutuelle à l’arrivée ou au moment de se quitter. Chaque rencontre est une célébration de la présence de Dieu au milieu de nous. Dieu est le Dieu de la vie qui est vécue, célébrée et partagée. Dieu est l’omniscient, tout puissant, mais très proche des gens et toute la création le concerne. Les croyants de la religion traditionnelle, le christianisme et l’islam sont conscients de la présence et de l’action de Dieu dans leur vie personnelle, de différentes manières, dans leurs familles et dans la société dans son ensemble. Cette référence constante à Dieu place Dieu au centre de l’existence.

La vie consacrée est précisément cela : faire de Dieu l’essence première de notre vie. Les conseils évangéliques l’expriment. Cependant, cet engagement doit être approfondi, renforcé et purifié par la prière personnelle et communautaire, l’étude fréquente et la méditation des Écritures et dans l’accompagnement spirituel.

3.2 La dignité de vie de chaque personne

Il y a une conscience commune que la vie jaillit de Dieu et que l’on reçoit cette vie pour la transmettre de manière respectueuse à la génération future[17]. La vie consacrée est enracinée dans une expérience personnelle de Jésus par chaque personne aimée et appelée par Dieu[18].  Ce rapport est vital pour la personne et surtout pour le reste de la communauté et de la société en général. Le don de la vie et sa promotion sont des valeurs très importantes dans les sociétés africaines. Cette promotion de la vie ne se limite pas à une simple procréation physique mais aussi à la promotion et la protection des valeurs de la société. Il existe des cas où certaines personnes sont choisies comme gardiennes de ces valeurs au nom du reste de la société et elles sont connues et respectées comme tel. Ce type de témoignage correspondrait, à mon avis, au témoignage des personnes consacrées dans l’Église-Famille de Dieu. De ce point de vue, la vie consacrée a un tremplin sur lequel construire. C’est dans la mesure où on aime sa vie, que l’on se sent aussi appeler à la partager avec les autres. La vie, comme tous le reconnaissent, est le don le plus précieux que Dieu nous offre.

3.3 Relations et vie communautaire

La vie communautaire est souvent tenue pour acquise dans les familles africaines. Cependant, le fait de vivre ensemble, en mangeant ensemble, en travaillant, en jouant et en pleurant ensemble renforce les liens en communauté. Cela est indispensable pour la personne en tant que personne en Afrique. Selon la philosophie Ubuntu, la personne est toujours identifiée comme un membre d’une famille ou d’un clan et pas seulement par lui-même et ses réalisations. Son comportement a des conséquences non seulement pour la personne mais aussi pour la communauté au sens large.

La communauté est une valeur chrétienne fondamentale car elle nous conduit à la source de la vie même de Dieu Trine. Dieu est une communauté ouverte et vivifiante. Chaque personne existe en relation avec l’autre et pourtant est distincte et a un rôle défini à jouer dans l’histoire du salut. Le fait que les gens d’origines culturelles différentes entendent le même appel et choisissent de s’entraider à y répondre en vivant en communauté est une source de force et un témoignage éloquent de la Bonne Nouvelle que la vie consacrée est pour le monde[19].  La solidarité élargie exprimée dans le la philosophie ubuntu, est un terrain fertile pour la vie consacrée et doit être amélioré chaque fois que c’est possible. La solidarité comme attitude d’amour ou d’affection, conduit les membres de la société à adopter les uns envers les autres des comportements semblables à ceux des membres de la même famille. Si la vie consacrée doit être ouverte à tous les peuples, en particulier dans les communautés internationales et interraciales, elle devrait être enracinée dans cette valeur africaine.

En termes théologiques, nous reconnaissons le péché comme la violation de la relation entre les êtres humains et Dieu, entre eux-mêmes et au fond du cœur de la personne. Le manque de respect pour la vie ou le manque de soins pour les bonnes relations entre les gens est en lui-même une déshumanisation. Car par ce fait, je me coupe de la communauté, instrument choisi par Dieu pour partager sa vie avec nous. C’est pourquoi, dans de telles circonstances, la personne n’est pas considérée comme un réel être humain. Plus grave est le mal fait, plus grave est le péché! La réconciliation dans et par le Christ reconstruit ces relations avec Dieu, avec les autres et avec soi-même.

3.4 Justice pour les faibles de la société

La vie et le dévouement des mères africaines envers leurs enfants et leur esprit de service aimable montrent que les faibles et les vulnérables dans la société doivent être aimés et aidés. Comme dans la Bible hébraïque (Dt 10,17), la société africaine, dans sa forme saine, protège les faibles, les pauvres, l’étranger, l’orphelin, etc. Il est interdit de profiter d’un étranger ou d’un pauvre ou de refuser de donner au voyageur un endroit où dormir et de quoi manger et boire de l’eau.

L’étranger est considéré comme une source de bénédiction et donc à accueillir. Cette attention envers le faible est au cœur de la vie consacrée comme un désir de suivre et d’agir comme Jésus l’a fait et a invité ses disciples à faire. Les Evangiles montrent que Jésus s’identifie toujours de préférence aux petits de la société et défend leur cause (Mt 25, 40)[20]. Ce souci de l’autre indépendamment du profit personnel que l’on peut tirer de cette relation est une valeur évangélique qu’une vie enracinée dans l’Evangile peut approfondir.

4. Défis pour la vie consacrée en Afrique

La vie consacrée en Afrique est confrontée à des défis. Certains d’entre eux sont propres au continent africain tandis que d’autres sont communs à la vie consacrée elle-même comme un état de vie permanent dans l’Eglise -Famille de Dieu dans le monde entier.

4.1 Discrimination interne

À l’époque où la majorité des membres des communautés de personnes consacrées n’étaient pas les gens du même pays, nous n’étions pas toujours conscients de divisions et des luttes internes. Cependant, dans la configuration actuelle des communautés, il y a parfois la tentation, dans certains cas, pour les gens de prendre parti pour de personnes de leur pays ou de leur tribu ou du clan indépendamment du fait que le bien commun est ainsi défendu ou pas. Dans un tel cas, il n’est plus question d’obéir à la Parole de Dieu et vivre par elle comme une nouvelle famille de Jésus (Mt 12,46- 50) mais ce sont les origines humaines de la personne qui comptent. Rien que l’adhésion à la Parole de Dieu dans la vie quotidienne ne doit saper le nouveau lien en Jésus dans la communauté et le témoignage.

4.2 Individualisme et consumérisme

La soif de développement personnel peut conduire et conduit parfois à agir uniquement pour les ambitions et les désirs personnels. Nous pouvons être si facilement pris par ce qui est à la mode et tomber dans une attitude consumériste. L’épanouissement personnel devient plus important que l’objectif commun à atteindre dans notre participation à la mission de Dieu. De cette manière, la personne n’est plus consacrée à Dieu, mais à elle-même. Cela affecte la qualité du témoignage et le courage de parler au nom de Dieu, soit pour montrer la voie à suivre, soit pour dénoncer ce qui va à l’encontre de l’Évangile.

4.3 Profiter d’un statut social

Les personnes consacrées sont encore à l’échelle sociale la plus élevée dans beaucoup de nos sociétés en Afrique. Elles ont eu ou ont encore accès à une formation académique, les voyages et les soins de santé coûteux payés par leurs instituts religieux ou leurs diocèses. Parfois, cela crée volontiers ou sans le vouloir, un complexe de supériorité chez certains où ils s’éloignent des personnes de qui ils sont venus et inversent ainsi les rôles. Ils s’attendent à être servis plutôt que de servir. Il peut également en résulter l’échec de développer des aptitudes d’être attentifs aux besoins du peuple parce que nous ne connaissons plus l’ « odeur des brebis » et ne pouvons donc pas accompagner leur croissance dans la foi.  Le complexe de supériorité, partout où il existe, est une grande menace pour la vie consacrée comme il va contre la valeur évangélique du service sur les traces de notre Seigneur et Maître qui n’est pas venu pour être servi mais pour servir et donner sa vie pour nous (Mc 10,44-45). Comment témoigne de notre engagement envers Jésus, pauvre, chaste et obéissant au service de tous ? Jésus le Serviteur doit, dans certains cas, être promu plus consciemment que Jésus le Chef ! Nous devons chercher des moyens de vrai partage de la vie des gens et surtout des pauvres et des marginalisés.

4.4 « Aucune condition n’est permanente »

« Aucune condition n’est permanente ». Ce slogan qui peut être lu sur certains véhicules au Ghana peut être appliqué aux différents états de vie aujourd’hui. La société moderne traverse une période de « crise » relative à tout engagement à long terme. Les engagements qui étaient censés être à vie ne sont plus permanents en tant que tel. Ils sont modifiés lorsque ce qui est considéré comme une meilleure occasion s’offre ou lorsque l’on sent que l’on n’est plus satisfait de cet engagement. Les engagements à court terme sont en train de porter des fruits dans certains cas et ils sont pris au sérieux. Toutefois, dans l’ensemble, des engagements temporaires minent certaines institutions comme le mariage qui pour fonctionner correctement a besoin de stabilité. La vie consacrée est également touchée par cette crise et est appelée à promouvoir la fidélité à Dieu et au prochain au milieu de changement d’options.

4.5 La culture comme « bouc émissaire » pour ne pas vivre les conseils évangéliques

Parfois la culture est utilisée comme bouc émissaire ou comme excuse pour ne pas vivre pleinement l’appel radical de l’Evangile à un engagement de célibat consacré, de pauvreté ou d’obéissance. Dire, par exemple que, puisque les Africains chérissent la vie, le célibat est contraire à la culture africaine et que la promiscuité sexuelle peut être tolérée, va en fait à l’encontre de la culture et n’est pas soutenable. C’est la promiscuité sexuelle qui est étrangère et non le célibat consacré. Un sens radical de la valeur évangélique de l’oblation totale consacrée / don de soi est nécessaire pour ne pas suivre deux chemins en même temps et ainsi mener une vie double. L’exemple de la bienheureuse Anuarite de la R.D Congo montre qu’il y a un prix à payer pour être fidèle à son engagement.

En ce qui concerne les obligations familiales, la culture peut aussi être un obstacle. L’attachement excessif à la famille et le souci de subvenir aux besoins matériels de la famille peuvent conduire à ne pas être entièrement libres dans ses décisions. On peut succomber à la pression familiale et se sentir obligé de répondre aux besoins de la famille et même ceux de la famille élargie. Cela a des répercussions sur l’appel à vivre la pauvreté évangélique pour la mission de Dieu. Jésus nous met en garde dans Lc 9, 57-62 contre de telles tendances.

Nous avons aussi le défi en tant qu’institutions de vivre la pauvreté parmi les personnes auprès de qui nous sommes envoyés tout en préparant/investissant pour notre avenir en tant qu’instituts. Comment maintenir l’équilibre entre partager avec les pauvres aujourd’hui et investir pour nos membres de demain ? Dans le même sillage, comment partager avec les pauvres tout en travaillant pour l’autonomie de l’Institut ?

4.6 Quelques défis institutionnels

Il existe deux types de défis institutionnels : l’un externe et l’autre interne. Au niveau externe, il apparaît parfois que les responsables locaux (évêques et pasteurs) ignorent et n’apprécient pas le charisme spécifique que les personnes consacrées apportent à l’Église locale. Les personnes consacrées sont facilement considérées comme une main d’œuvre bon marché/ un personnel pour différents services dans l’Église indépendamment du fait que cela corresponde ou non au charisme de leur Fondateur. Ces personnes répondent simplement à un besoin de personnel de l’Église locale. Comment nous assurer, comme le dit le pape François que « le charisme de divers ordres religieux (sont) respectés et favorisés parce qu’ils sont nécessaires dans des diocèses »[21] ?

Au niveau interne, il y a un défi institutionnel de rendre le charisme du Fondateur pertinent et actuel dans un contexte local aujourd’hui non pas comme un corps étranger mais en tant que des chrétiens africains de sorte que la consécration ne soit pas perçue comme quelque chose d’étranger mais comme dérivant d’une vie pleinement vécue des valeurs et de l’éthos de la culture africaine. Dans son discours aux supérieurs généraux en novembre 2013, le pape François les avait mis au défi en disant : « Le charisme n’est pas une bouteille d’eau distillée. Il doit être vécu énergiquement aussi bien que réinterprété culturellement. Mais de cette façon, il y a le danger de commettre une erreur ou des erreurs. C’est risqué. Certainement : nous commettrons toujours des erreurs. Il n’y aucun doute sur ça. Mais cela ne devrait pas nous bloquer, parce c’est possible de commettre de pires erreurs.... je ne parle pas d’adaptations folkloriques ou de coutumes... c’est une question de mentalité, un état d’esprit »[22].

Le Cardinal Lavigerie a fondé les Missionnaires d’Afrique (1868) et les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique (1869) pour la mission ad gentes en Afrique. Sa devise épiscopale était Caritas et il encouragea ses fils et ses filles à vivre la politique de saint Paul de « tout pour tous les hommes » (1 Co 9, 22). Comment actualiser cela sans tomber dans un fanatisme qui nous fait croire que nous devons être les sauveurs de tous ?

Conclusion

Comme le disait le Pape Paul VI dans Africae terrarum (29 octobre 1967): « L’Eglise considère avec un grand respect les valeurs morales et religieuses de la tradition africaine, non seulement en raison de leur signification, mais aussi parce qu’elle les voit comme providentielles, comme la base pour diffuser le message de l’Évangile et commencer l’établissement de la nouvelle société dans Christ »[23]. L’édification d’une nouvelle société imprégnée de l’Evangile du Christ est encore en marche en Afrique (et ailleurs) et la Vie Consacrée y a beaucoup contribué. Un style de vie fondé sur l’Evangile et le leadership vécu comme un service humble y contribueront. Ce message doit être ramené à la maison dès les premières années de la formation initiale.

La vie consacrée n’est plus un produit étranger importé en Afrique. Elle fait partie intégrante de notre vie et peut vraiment grandir à partir des « valeurs et de l’éthos » de nos mères et de nos pères de la sorte qu’elle porte des fruits d’amour total et radical de Dieu et du prochain, conduisant au partage et à la justice. Il ne devrait plus s’agir d’être un chrétien qui s’est adapté, incarné ou des valeurs africaines inculturées, mais plutôt d’être un caractère/une identité unie comme un chrétien africain parce que ces valeurs et les autres sont ce que le Christ veut que nous vivions pour avoir la vie en abondance en lui.

Pour parvenir pleinement à cette vie dans le Christ, nous devons aussi être conscients des blocs ou de pierres d’achoppement et, avec l’aide de Jésus, les transformer en tremplins ! Le type de formation initiale et continue offerte aux nouveaux membres et aux membres actuels est importante. Elle devrait être contextualisée et le plus possible liée à l’Évangile et à la culture en Afrique parce que, comme le dit le pape François : « Les religieux doivent être des hommes et des femmes capables de réveiller le monde entier »[24]. Le défi qui nous attend est énorme mais pas impossible si nous prenons notre vocation au sérieux et la vivons joyeusement dans le Seigneur[25].

Question à débattre

Selon votre expérience, quelles sont certaines ressources et des défis de la vie consacrée en Afrique ?

 

[1] Le titre en italien du texte était : “La Vita Consacrata come stato permanente di vita nella Chiesa: fondamenti, processi in atto, problematiche”

[2] Oborji, Francis Anekwe. "Catholic Mission in Africa", in Bevans, Stephen B., (editor), A Century
of Catholic Mission. Roman Catholic Missiology 1910 to the Present, (Regnum Edinburgh
Centenary Series), Cornwall, Regnum Books, 2013, pp. 13-15; Aylward Shorter, Léo Volker.
Architect of Aggiornamento 1957-1967, Rome Istituto Salesiano, 2013, p. 27.

[3] Comme membre d’une société missionnaire de vie apostolique, j’emploie ce terme dans son sens plus large pour signifier les prêtres, les sœurs et les frères qu’ils soient des congrégations religieuses ou des sociétés de vie apostolique. Pour une personne ordinaire, il est parfois difficile de les distinguer.

[4] Cf. Eunice Karanja Kamaara, “No Longer Truly African, but Not Fully Christian: In Search of a New
African Spirituality and Religious Synthesis”, in Agbonkhiangemeghe E. Orobator, (editor), Theological Reimagination. Conversations on Church, Religion, and Society in Africa, Nairobi, Paulines Publications, Africa, 2014, pp. 90-91.

[5]This was the term that was initially in vogue after Vatican II. Adaptations in Liturgy, for example,
were not to be done at the expense of the “substantial unity of the Roman rite”, cf. Aylward Shorter
Toward a Theology of Inculturation, London, Geoffrey Chapman, 1988, p. 191.  

[6]SECAM in 1974 emphasised the value of being created in God’s image with the consequence that all are of the same value.

[7] Cf. Aylward Shorter, “Inculturation of African Traditional Religious values in Christianity – How
Far?”, in Chidi Denis Isizoh, Christianity in dialogue with African Traditional Religion and Culture.
Seminar Papers Volume One, Vatican City, Pontifical Council for Interreligious Dialogue, Ceedee
Publications, 2001, pp. 60-82. Through inculturation the Gospel is presented or re-expressed throughthe forms and terms of the culture concerned. As a result, the culture itself is transformed and /orpurified by the faith that it receives. Among the Theologians of inculturation we can mention AylwardShorter, Charles Nyamiti, Laurenti Magesa, and others. Unfortunately, inculturation has often been associated with the external manifestations of the values in Liturgy, dress, music, etc. This is important but is not the essence!

[8] Acta Apostolicae Sedis LXI, 1969, pp. 576-578, quoted by Chidi Denis Isizoh, The Attitude of the
Catholic Church towards African Traditional Religion and Culture. 100 Excerpts from the Magisterial
and Other Important Church Documents, Roma, Tipografica Leberit, 1998, pp. 28-29.

[9] Eunice Karanja Kamaara, “No Longer Truly African, but Not Fully Christian, p. 86.

[10]Eunice Karanja Kamaara, “No Longer Truly African, but Not Fully Christian, p. 87.

[11] Cf. V. Mulago, “Traditional Religion and Christianity, in J.K. Olupon (ed.), African Traditional Religions in
Traditional Society, Minnesota, St Paul, 1991, pp. 125-126.

[12]Eugen Suom-Dery, Family as Subject of Moral Education in the African Context. Incarnating Christian Ethics
among the Dagara of North-Western Ghana (Theos-Studienreihe Theologische Fortsergebnisse Band 44),
Hamburg 2000, p. 75; K.A. Dickson, “Continuity and Discontinuity between the Old Testament and African Life
and Thought”, in K. Appiah-Kubi & S. Torres, African Theology en Route. Papers from the Pan-African
Conference of Third World Theologians, December 17-23, 1977, Accra, Ghana, Maryknoll 1979, pp. 103-105.

[13] Cf. Julian Mujuru, “The Contribution of Africa to Consecrated Life”, and Thecla Ndegwa, “Ubuntu as a
Contribution of Africa to Consecrated Life”; Papers delivered on 28th February 2015 to the Association of
Africans and Malgascar in the Service of Generalates, Rome (in response to the Conference of Mgr Jose
Rodriguez Carballo, “La Vita Consacrata in Africa”.

[14]Eunice Karanja Kamaara, “No Longer Truly African, but Not Fully Christian”, p. 91

[15] Eunice Karanja Kamaara, “No Longer Truly African, but Not Fully Christian”, p. 91.

[16] Cf. John S. Mbiti, Introduction to African Religion, Johannesburg, Heinemann Publishers, 1991, pp.
45-59.

[17] Cf. John S. Mbiti, Introduction to African Religion, pp. 112-115.

[18] The Instruction of the Congregation for Institutes of Consecrated Life and Societies of Apostolic Life
of 2002 is appropriately entitled Starting Afresh from Christ. A Renewed Commitment to Consecrated
Life in the Third Millennium. As Benedict XVI reminded the Church in Africa, New Evangelisation is
possible only as a result of a personal encounter with Jesus and not an idea. Cf. EsortazioneApostolica Postsinodale Africae munus, del Santo Padre Benedetto XVI All’episcopato, al clero, alle
persone consacrate e ai fedeli laici sulla Chiesa in Africa al servizio della riconciliazione, della giustizia
et della pace, Vatican, Editrice Vaticana, 2011, n° 165

[19] Cf. Benedict XVI, Africae munus, n° 108-112

[20] Cf. Francis, The Joy of the Gospel. Apostolic Exhortation Evangelii Gaudium of the Holy Father, Nairobi,
Paulines Africa, 2013, § 2019-2016.

[21] Pope Francis with Antonio Spadaro, My Door is always Open. A Conversation on Faith, Hope and
the Church in a Time of Change. Translated from the Italian by Shaun Whiteside, London, New Delhi,
Bloomsbury, 2014, p. 161.

[22]Pope Francis with Antonio Spadaro, My Door is always Open, p. 151.

[23] Quoted by Aylward Shorter, Toward a Theology of Inculturation, p. 207.

[24] Pope Francis with Antonio Spadaro, My Door is always Open, p. 146.

[25] Cf. Congregation for Institutes of Consecrated Life and Societies of Apostolic Life. Year of
Consecrated Life. November 2014-2015. A Letter to consecrated men and women. A message from
the teachings of Pope Francis.


Consecrated Life in Africa: Chances and Challenges[1]

Fr. Richard Kuuia Baawobr, m.afr

Richard Kuuia Baawobr M.Afr., born June 21, 1959 in Nandom, in the Lawra district of Ghana, died on November 27, 2022 in Rome. He was a Ghanaian cleric, former Superior General of the ‘White Fathers’, the first African to hold this position (2010-2016) and afterwards, Bishop of Wa from 2016 until his death. He was created Cardinal by Pope Francis on May 29, 2022. Elected President of SECAM on July 30, 2022, he died in Rome on November 27, 2022.

Abstract
The positive outlook of Vatican II on the culture and religion of Africa has helped Theologians and Philosophers to reflect on Consecrated Life from African perspectives. Concepts like adaptation, incarnation and inculturation have been explored in these reflections. Some are certainly more adequate in the reflection of the relevance of Consecrated Life in Africa. In this article, we explore with the help of Eunice Karanja Kamaara’s concept of unification, how the African culture in itself has core values that, if lived to the full, are really the best of the Gospel of Jesus. These values include the sense
of the omnipresence of God, the dignity of the human person, the relationship in community and care for the weak of society. These values are held together in the Utu spirit of interdependence and can be rightly considered as stepping stones upon which Consecrated Life in Africa (and elsewhere) can flourish. However, Consecrated Life is currently challenged by several factors like internal discrimination in our communities, individualism and consumerism, taking advantage of one’s social status, crisis in permanent commitments, hiding behind culture to justify some failures in living the evangelical counsels, and facing the institutional challenge of living the charism and responding to the
local pastoral needs and caring for the poor toady while preparing a sustainable future tomorrow. It is important to over these challenges by using them as further stepping stones rather than considering them as stumbling blocks.

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[1] The Italian title proposed was “La Vita Consacrata come stato permanente di vita nella Chiesa: fondamenti, processi in atto, problematiche

P. Richard Kuuia Baawobr, m.afr
27 Janvier 2023
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