Quel dialogue en R.D. Congo?
Depuis l’an 2011, du 1er au 7 Févier, nous célébrons la semaine mondiale de l’harmonie interconfessionnelle, avec la conviction que la compréhension mutuelle et le dialogue entre les religions constituent deux dimensions importantes de la culture de la paix dans le monde. C’est dans cette perspective que certains confrères de la communauté du Théologat International de Kinshasa ont voulu sortir de leur zone de confort pour aller rencontrer les Musulmans qui se réunissent à la mosquée de Masina dans la ville de Kinshasa. L’accueil chaleureux qui leur a été réservé de la part du secrétaire de la mosquée et sa disponibilité pour une meilleure compréhension mutuelle à travers le dialogue sont des signes éloquents pour une possibilité de vivre ensemble différents sans différends.
Il faut souligner qu’une juste appréciation du dialogue interreligieux présuppose un contact étroit entre les fidèles. Cela implique, à côté des connaissances théoriques, une expérience réelle du dialogue interreligieux (Cf. «Dialogue et annonce. Réflexions et orientations concernant le dialogue interreligieux et l'annonce de l’évangile », dans Bulletin du C.P.D.I., cité du vatican, (1991) no 77, p.266.)
1. Les types de dialogue islamo-chrétien et leurs contextualisations en RD Congo
La compréhension islamique du christianisme et la connaissance chrétienne de l’Islam nous révèlent quelque fois une vision biaisée et limitée. Cependant, nous avons toujours la possibilité de faire mieux à travers la voie du dialogue afin de promouvoir la compréhension mutuelle et la paix commune. Pour que ce dialogue soit possible, le recours aux différents niveaux de dialogue est indispensable. Autrement dit, les dialogues de la vie, de l'action et de l'expérience religieuse s’adressent à un public très large alors que le dialogue théologique est réservé aux spécialistes (M. DELGADO, F-X. AMHERDT, Le Dialogue Interreligieux : Où en sommes-nous ? p.93-94.) En tenant compte de la situation islamo-chrétienne en RDC, on peut se demander quel serait le genre de dialogue approprié. Nous allons confronter les formes de dialogue à la réalité islamo-chrétienne congolaise à l’aide d’une enquête sur l’Islam menée par la Sœur Ngalula.
2. Le dialogue islamo-chrétien en RD Congo
La mise en application de ces différentes formes de dialogue dépend d’un pays à l’ autre et du contexte du milieu. Pour ce faire, les résultats d’une enquête effectuée par Ngalula entre le mois de Décembre 2014 et Février 2015 autour des Mosquées de Kinshasa (Barumbu, Masina, Ndjili, Limete, Matete) peuvent nous servir de phare. Dans l’échantillon de 100 musulmans interrogés, 28% ont déclaré être musulmans depuis leur naissance, 19% proviennent des milieux pentecôtistes ou néo-pentecôtistes, 55% sont des anciens catholiques ou protestants, et 26% proviennent des religions traditionnelles africaines (J. NGALULA, « L’islam en Afrique et ses enjeux pour le dialogue islamo-chrétien. Cas de la République Démocratique du Congo », dans Nurt SVD, (2015) no 2, p. 336.) Ces statistiques nous donnent l’idée sur la composition de nos partenaires dans le dialogue islamo-chrétien.
À la question de savoir pourquoi ont-ils quitté leurs premières religions pour adhérer à l’Islam, les raisons divergent. Dans cette enquête, Ngalula en a retenu quatre éléments principaux :
« 13% en majorité des femmes l’ont fait pour mieux s’intégrer dans la famille du conjoint; 54% voient dans cette religion une opportunité d’émergence sociale (avoir facilement des crédits des milieux financiers, scolarités gratuites dans les écoles coraniques); 3% de nouveaux convertis (adolescents) ont déclaré avoir été séduits par le fait que l’islam est aujourd’hui à la mode dans les médias et enfin 2% ont été attirés par les opportunités de «puissance spirituelle» qu’offrent les marabouts musulmans » (J. NGALULA, Op.Cit., pp. 365-366).
Les résultats de cette enquête incitent tout homme conscient de la nécessité du dialogue à se poser des questions sur la modalité du dialogue approprié en RDC. Comment faire un dialogue sérieux lorsque la majorité des adeptes sont motivés par des avantages sociaux ? Malheureusement, affirme la Révérende Sœur, « le même phénomène de considérer le changement d’appartenance religieuse comme une source d’accéder automatiquement à la prospérité matérielle se retrouve également à l’intérieur du christianisme africain, spécialement dans les milieux néo-pentecôtistes, avec leur fameux «évangile de la prospérité» (J.NGALULA, OP.Cit., p. 368).
Tout bien considéré, le dialogue entre les Musulmans et les Chrétiens qui ont tendance à réduire leurs respectives religions aux effets de bien-être socio-économique, constitue un défi majeur. Pour faire face à ce défi, la promotion d’un dialogue qui touche la vie du peuple RD Congolais peut aider les croyants à partager leurs joies et leurs peines. Comme l'Islam et le Christianisme ont la longue tradition de prendre soin des nécessiteux. L’assistance aux pauvres, par exemple, peut amener les deux religions à travailler ensemble.
En somme, le fait que les fidèles de ces deux religions, parmi les plus grandes du monde, vivent ensemble, l’éducation au dialogue islamo-chrétien devrait être une préoccupation de nos autorités religieuses et du système éducatif du pays.
Enlaces y
Descargas
Accede aquí con tu nombre de usuario y contraseña para ver y descargar los archivos reservados.